Nicolas est né en Hongrie, en 1928, dans une famille de cinq enfants. Alors que les Roth se pensent enfin à l’abri, en mars 1944, les nazis envahissent le pays. En l’espace de quelques jours, leur vie va basculer. Sentant la fin de la guerre approcher, les Allemands accélèrent le rythme : la déportation des Juifs hongrois se fait à une cadence infernale. En sept semaines, plus de 435 000 personnes sont déportées à Auschwitz, dont une immense majorité n’entreront même pas dans le camp et seront envoyés directement à la chambre à gaz. Nicolas est déporté avec son père, sa mère et sa plus jeune sœur. Les trois autres enfants avaient déjà quitté la Hongrie pour aller à Paris. À la sélection à Auschwitz, il est séparé de ses parents et de sa sœur. Quand, quelques jours plus tard, il demande où ils sont, on lui montre la fumée qui sort des cheminées. Il lui faudra quelques jours pour comprendre que ce qu’il juge d’abord inconcevable est probablement la vérité. Peu nombreux dans le camp, les Hongrois sont mal considérés par les autres détenus, avec qui la communication est difficile à cause de la langue. Malgré tout, Nicolas survit sept mois à Auschwitz-Birkenau ainsi que les marches de la mort qui le conduisent à Dachau. Une fois libéré, il mettra plusieurs mois avant d’arriver en France en février 1946, où il retrouvera un frère et une sœur. Il ne leur raconte rien, pas plus qu’il ne parlera à ses trois enfants plus tard. Ce n’est qu’en 1985, quarante ans après la fin de la guerre, à la sortie du film Shoah, que sa parole se libère enfin. Deux années durant, dès qu’il a un moment, le soir et le week-end, il travaille sur son manuscrit. Il y raconte son parcours, mais tente aussi d’expliquer du mieux qu’il le peut les rouages de l’infernale machine nazie, pour que le monde puisse en comprendre la sophistication. Selon lui, en tant qu’ancien déporté, son rôle est de faire savoir aux hommes jusqu’où l’homme peut aller, afin qu’ils restent vigilants et qu’une telle chose ne se reproduise jamais. [...+]